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Le Minor

Behind the brands

Retour sur cent ans d’histoire, de défis et de réussites. Le Minor, marque héritage et entreprise du patrimoine vivant français nous a ouvert ses portes à Guidel, en Bretagne. 

Rencontre avec Sylvain Flet, co-dirigeant de la marque aujourd’hui. 

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Qu'est-ce que Le Minor ? 

Sylvain: Le Minor, c'est une marque de mode historique et une marque fabricante. On est spécialistes de la maille. À l’origine, on fabrique des pulls marins et des marinières, et aujourd'hui nous avons toute une gamme d'intemporels : des pulls marins, des pulls militaires et du jersey plus contemporain, avec des t-shirts et des marinières revisitées. Nous conservons notre ancrage marin car cela fait historiquement partie de la marque, mais développons également de nouveaux modèles. La particularité de Le Minor, c'est que nous sommes une marque fabricante. Nous achetons des bobines de fil, pour la plupart en France, et les transformons en vêtements au sein de nos propres ateliers, en assumant toutes les étapes de confection et de transformation du vêtement. Souvent, quand on pense marque fabricante "made in France", on pense à la confection, tandis qu'ici nous assumons tout ce qu'il y a avant, on tricote soit du tissu en Jersey pour le coton, soit des étoffes, des morceaux qui vont ensuite devenir des pulls. Ensuite, on les coupe, et on les assemble. Donc, il y a une multitude d'étapes et de savoir-faire qu'on sauvegarde et développe au sein de nos propres ateliers. C'est une vraie différence pour Le Minor parce que c'est un modèle qui est très rare. 

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Quand l'aventure a-t-elle commencée pour vous ? 

Sylvain : Je suis co-dirigeant de Le Minor, je suis associé à Jérôme, un ami de longue date, avec qui j’ai repris la marque en 2018. À l'époque, il y avait 23 personnes et une marque qui avait quasiment disparu du territoire puisqu'on faisait 90% de notre activité au Japon. C'est un peu les Japonais qui ont sauvé la marque Le Minor. Depuis 2018, on s'emploie à continuer cette belle histoire avec le Japon, mais aussi à faire renaître cette marque française historique qui a fêté ses 100 ans en 2022. 

À quels enjeux avez-vous fait face ? 

Sylvain : L'histoire de Le Minor a 100 ans, elle est très longue et très riche. La plus grande crise qu'ont traversé nos prédécesseurs est celle du textile en France. Ils l'ont traversée de manière extrêmement courageuse et engagée, puisqu'ils ont décidé de ne rien délocaliser, à l'inverse de tous les autres industriels du secteur. Durant cette période, de 1990 à 2010, 90% des entreprises textiles en France ont mis la clé sous la porte. Le Minor a survécu. Comment ? En assumant cet ancrage local des savoir-faire et en se positionnant sur un segment haut de gamme. Ce pari n'a cependant pas trouvé caisse de résonance en France dans un premier temps, mais a permis de se développer au Japon. En conséquence, la marque a quasiment disparu en France. Il y avait un énorme paradoxe, lorsqu’on a repris l’activité en 2018, c’est que les vêtements, les pulls et les marinières les plus français dans leur fabrication n’étaient plus connus en France.

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Comment avez-vous fait face à ces défis ? 

Sylvain : Durant la crise du textile, chez Le Minor, nous sommes passés de 750 employés dans les années 70 à seulement 23 employés en 2018. À ce moment-là, notre défi a été de faire perdurer la marque, maintenir son ancrage local et son savoir-faire ; tout en modernisant son appareil industriel. Pour cela, nous avons renouvelé tout le parc de machines de confection pour gagner en confort de travail et en productivité. Le second défi était de reconquérir la notoriété que nous avions perdu en France, comme je vous le disais plus tôt, la marque avait quasiment disparu du territoire français, il était donc nécessaire de reprendre la parole et de nous faire connaître. Nous continuons aujourd'hui à faire ce travail pédagogique sur la fabrication française, sur les dernières filatures françaises de coton dans les Vosges et sur l'impact régional d'une activité comme la nôtre. 

D'où vient le nom Le Minor ?  

Sylvain : C'est un nom de famille originaire de Bretagne, région d'origine de la marque où nous nous situons toujours aujourd'hui. La famille Le Minor a créé la marque en 1936. Mais à l'origine, le premier atelier, fondé en 1922, s'appelait Manufacture de bonneterie lorientaise, et fabriquait des vêtements de travail : des pulls marins et marinières pour les marins pêcheurs bretons. Ce métier du tricot et de la maille fait partie de notre identité et nous travaillons à le faire perdurer.  

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Quelles sont les étapes de fabrication ? 

Sylvain : Chez Le Minor, on a la particularité d'intégrer toutes les étapes de fabrication. Au départ, on reçoit les bobines de fil de coton ou de laine. On ne travaille que des matières naturelles. La première étape est le tricotage. Il y a deux techniques de tricotage différentes, pour le coton c'est du tricotage circulaire qui permet de faire de l'uni et des rayures. Ensuite, vous allez avoir le tricotage rectiligne pour la laine. Les panneaux de laine doivent ensuite être vaporisés.  

Cette étape de vaporisation est essentielle, elle consiste à injecter de la vapeur dans les panneaux pour les fixer afin que leur taille soit définitive, et pour corriger toute déformation éventuelle. Pour le coton, cette étape est la seule que nous externalisons. Nous envoyons nos rouleaux de coton tricotés dans un atelier à Roanne, à côté de Lyon, où il y a encore un bassin textile assez conséquent. Là-bas, ils vont "stabiliser" notre jersey de coton en le lavant et en l'apprêtant pour qu'ensuite il soit prêt à être coupé, confectionné et surtout qu'il ne rétrécisse pas en machine. Après, il y a la coupe. La coupe, c'est assez spécifique parce que la maille est une matière qui est naturellement élastique et qui doit donc être appréhendée à la main. C'est une étape manuelle qui réclame un savoir-faire minutieux et précis pour garantir non seulement la forme du vêtement, mais aussi l'alignement des rayures lorsqu'il y en a. Quand on fait du vêtement marin avec des rayures, il faut que la rayure soit accordée, et qu'il n'y ait aucun décalage. Après la coupe, vous avez l'assemblage. L'assemblage comprends plusieurs étapes: le picage simple, le surjet et les ourlets.

Ensuite il y a les finitions : boutonnières, poses de bordées et remaillage. Le remaillage, c'est une technique d'assemblage extrêmement fine qui est normalement réservée à l'industrie du luxe, elle sert à assembler le col et le corps des pulls en laine en rouvrant chaque maille une par une. Cette technique est assez symbolique des savoir-faire qu'on essaye de faire perdurer chez nous. À l'issue de toutes ces étapes, il y a le contrôle qualité durant lequel la pièce va être minutieusement inspectée pour s'assurer que le vêtement soit parfait.

Pour ce qui est de la création, comment procédez-vous ? 

Sylvain : On a la chance d'avoir une histoire très riche donc une grande partie de notre collection est constituée d’intemporels. Notamment, le Pull Marin classique qui se décline dans plusieurs coloris, et le pull Officier de Marine qui est l’un de nos bestsellers. C'est encore une surprise, mais il se trouve que ce pull qu'on a fabriqué pour la Marine Nationale pendant 40 ans, continue d’avoir beaucoup de succès. On l'a gardé dans notre collection parce que c'est un beau vêtement, et une référence en termes de solidité et de durabilité. Nous avons tout le trousseau du marin : le pull Sous-Officier sans les épaulettes, le pull Sous-Marinier et la Marinière de la Marine Nationale. Et bien sûr, notre gamme de marinières classiques en jersey, fabriquées à partir de coton filé en France. Cela donne une gamme de produits intemporels qui sont reconduits année après année, et pour certains depuis 100 ans.  

C'est assez facile de créer des vêtements chez nous puisqu'on a cette base de modèles historiques, auxquels on vient apporter des couleurs de saison. On créer également de nouvelles gammes autour de notre métier central qui est la maille, nous réinterprétons notre savoir-faire en proposant des vêtements qui sont inspirés du vestiaire marin. Le Pull Marin en tant que tel on peut le recomposer de mille manières différentes, que ce soit en termes de coupe ou de matière. Récemment, on a sorti un hoodie en laine mérinos avec un nouveau point de tricot qu'on a développé ici et qui donne une maille très confortable, douce et complètement unique car on ne retrouve ce point nulle part ailleurs. 

Notre enjeu, c'est aussi de positionner Le Minor comme une marque haut de gamme de maille qui n'a pas forcément qu'un ADN marin. Il faut savoir que Le Minor, dans les années 50, 60, 70, avait un positionnement très proche du luxe autour notamment d'une gamme de manteaux. Le Minor a travaillé en marque blanche pour Dior, Courrèges et pour d'autres grandes maisons de haute couture. 

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Que peut-on vous souhaiter pour la suite ? 

Sylvain : En cinq ans, nous avons réussi à faire nos preuves en tant que marque de mode fabricante. On peut donc nous souhaiter de continuer sur cette lancée. On espère réussir à convaincre de plus ne plus de gens de l'importance de la mode locale, à la fois en termes de qualité, de savoir-faire et d'impact environnemental. J'aimerais bien, qu'il y ait un changement de mentalité qui s'ancre vraiment et qu'on retrouve un peu le bon sens qu'avaient nos grands-parents et les générations précédente, c’est-à-dire avoir conscience qu’un vêtement bien fait, ça coûte cher mais ça s’entretien et se conserve pendant des années. Et qu’on peut même le transmettre.  

Cette prise de conscience a déjà commencé, mais il y a encore beaucoup de chemin à faire parce qu'aujourd'hui la fast fashion ne tremble pas, que les mécaniques d'achat et la manière de consommer la mode sont extrêmement consuméristes. La mode est encore considérée comme du consommable, du jetable. Et ça, c'est un phénomène qui a la vie dure. Ce qu'on peut souhaiter à Le Minor, comme à toutes les marques historiques et les marques fabricantes comme nous, c'est qu'il y ait un changement de mentalité qui s'opère vraiment et qu'on revienne à de l'achat de qualité durable au sens propre du terme, c'est à dire acheter des vêtements qui durent dans le temps. 

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Pull Marin, Le Minor
Ajout rapide

LE MINOR

Prix 180,00 €

Pull Marin